Si distinguer les couleurs avec précision nous semble être une capacité toute naturelle, recréer la vision artificiellement est en réalité un grand défi optique. Des scientifiques de la Georgia State University sont parvenus à créer un nouveau type de capteur de couleur qui semble prometteur dans ce domaine.
Bien entendu, il existe déjà des capteurs de couleur efficaces, comme on en trouve dans les composants électroniques actuels. L’avancée présentée par les scientifiques réside plus dans la miniaturisation. Leurs résultats ont été publiés dans la revue ACS Nano, et proposent une nouvelle architecture des composants qui permet de créer des capteurs à l’échelle nanométrique, tout en conservant une bonne captation des couleurs. Selon les chercheurs, cette architecture pourrait aussi être évolutive, et donc permettre beaucoup d’usages différents.
Cette fonction critique est, selon l’étude, particulièrement compliquée à miniaturiser tout en étant une clef du développement de nanotechnologies apparentées. « À mesure que la nanotechnologie progresse et que les appareils deviennent plus compacts, ces capteurs de couleur plus petits et très sensibles seront incroyablement utiles », affirme ainsi Cliff Michaels, directeur du Bureau du transfert de technologie et de la commercialisation à la Georgia State University, dans un communiqué publié par l’établissement.
En effet, les capteurs de couleur conventionnels se présentent généralement selon une structure horizontale, ce qui nécessite beaucoup d’espace. La nouvelle architecture proposée par les chercheurs est cette fois-ci verticale, et fonctionne selon un principe d’empilement de couches.
Cette disposition permet un gain d’espace, tout en préservant la qualité de la captation et en simplifiant le fonctionnement de la lentille. Elle a été rendue possible par des avancées techniques au niveau des matériaux utilisés. « La nouvelle fonctionnalité obtenue dans notre architecture de capteur d’image dépend entièrement des progrès rapides des semi-conducteurs de Van der Waals au cours des dernières années », explique Sidong Lei, qui a dirigé la recherche. En comparaison des semi-conducteurs conventionnels, tels que le silicium, ce type de semi-conducteur leur permet de maîtriser avec plus de précision certains paramètres, tels que la structure ou l’épaisseur. Ces paramètres sont importants pour la détection du rouge, du vert et du bleu.
Un point clef pour le développement d’yeux artificiels
« L’ultra-minceur, la flexibilité mécanique et la stabilité chimique de ces nouveaux matériaux semi-conducteurs nous permettent de les empiler dans des ordres arbitraires. Ainsi, nous introduisons en fait une stratégie d’intégration tridimensionnelle contrairement à la disposition actuelle de la microélectronique planaire. La densité d’intégration plus élevée est la principale raison pour laquelle l’architecture de nos appareils peut accélérer la réduction d’échelle des caméras », précise Sidong Lei.
C’est de là que vient le nom alambiqué de leur dispositif : « capteur de couleur vertical à semi-conducteurs Van der Waals ». Les scientifiques le présentent comme une nouvelle classe de matériaux, dans laquelle les couches atomiques individuelles sont liées par de faibles forces de Van der Waals. Les forces de Van der Waals, nommées ainsi en l’honneur du physicien néerlandais Johannes Diderik Van der Waals, correspondent à une interaction électrique d‘intensité faible ayant lieu à courte distance entre atomes et/ou molécules.
Au-delà de ça, et à plus longue échéance, ce capteur de couleur pourrait constituer un point clef dans les avancées concernant le développement d’yeux artificiels destinés aux malvoyants et aux aveugles. « Cette technologie est cruciale pour le développement d’yeux électroniques biomimétiques ainsi que d’autres dispositifs prothétiques neuromorphiques », déclare Sidong Li. « La fonction de détection des couleurs et de reconnaissance d’image de haute qualité peut offrir de nouvelles possibilités de perception des éléments colorés pour les malvoyants à l’avenir ».
Source : ACS Nano