Dans une interview donnée au Wall Street Journal, Elon Musk a fait allusion au projet Neuralink, et à de possibles expérimentations sur le cerveau humain dès l’année prochaine de cette puce connectée aux neurones.
Comme à son habitude, il n’a d’ailleurs pas hésité à être très affirmatif sur le sujet sur Twitter. « Remplacer les neurones défectueux/manquants par des circuits est la bonne façon d’y penser. De nombreux problèmes peuvent être résolus simplement en reliant les signaux entre les neurones existants. Les progrès s’accéléreront lorsque nous aurons des appareils chez l’homme (difficile d’avoir des conversations nuancées avec des singes) l’année prochaine », lance-t-il ainsi à un certain Jeremy qui lui demande quand l’appareil sera disponible pour traiter la perte de mémoire d’un de ses proches.
Dans un premier temps, le fameux « Link » aurait pour but d’être implanté à des personnes tétraplégiques pour leur permettre de contrôler à distance des ordinateurs, leur smartphone, etc. Des applications qui permettraient de rendre à ces personnes leur mobilité suscitent aussi beaucoup d’espoirs. Pourtant, il ne semble pas que le feu vert de la Food and Drugs Administration (FDA), nécessaire pour ce genre de tests, ait encore été donné.
Il faut aussi souligner qu’Elon Musk a déjà annoncé plusieurs fois ce début des expérimentations humaines. En 2019, il affirmait qu’elles commenceraient en 2020. En 2021, en répondant à une personne paralysée qui lui disait être prête à faire des tests, il parlait de débuter dans l’année même : « Neuralink travaille très dur pour assurer la sécurité des implants et est en communication étroite avec la FDA. Si les choses se passent bien, nous pourrons peut-être faire les premiers essais humains plus tard cette année », annonçait-il ainsi au mois de février.
Des implants cérébraux pour rétablir des sens
Concrètement, qu’est-ce que Neuralink, et pourquoi cet implant est-il attendu avec autant d’impatience ? Il s’agit de ce qu’on appelle des « implants cérébraux d’interfaces neuronales directes ». Dans la théorie, et selon ce que les premières expériences de différents scientifiques montrent, ces implants ont le potentiel de pallier directement de nombreux dysfonctionnements du cerveau, tels que la paralysie, la maladie de Parkinson, ou encore des pertes de mémoire…
Comment cela fonctionne-t-il ? Selon la Fédération de la recherche pour le cerveau, les cellules sont « l’unité de travail de base » du cerveau. Ce sont des cellules spécialisées qui transmettent des informations à d’autres cellules nerveuses, selon leur spécialité. Elles sont globalement constituées de :
- La dendrite, qui reçoit un signal nerveux.
- Le soma, corps cellulaire qui le décode.
- L’axone, qui le transmet.
Les neurones sont connectés entre eux via des synapses, qui sont des connexions entre l’axone et la dendrite. Ils communiquent grâce à des signaux électriques, appelés potentiels d’action : c’est cela qui libère les neurotransmetteurs, ces « messagers chimiques » chargés de passer à travers les synapses pour aller transmettre l’information. Au fil du temps, les scientifiques ont détecté des zones du cerveau reliées au mouvement, la vue, le toucher…
Concrètement, les implants cérébraux d’interface directe ont donc pour mission de capter les « intentions » des cellules neuronales. Le principe de Neuralink, comme celui d’autres innovations du même type, est d’implanter des électrodes dans le cerveau, à proximité des neurones. Il leur est ainsi possible de détecter les potentiels d’action, ces fameux courants électriques qui servent à déclencher l’afflux d’informations. Ces électrodes sont reliées à une puce qui permet différentes interactions. En stimulant les neurones par un faible courant électrique, on peut déclencher artificiellement une information, par exemple.
D’un autre côté, en détectant le moment où le potentiel d’action devrait en temps normal déclencher quelque chose (un mouvement, une perception…), il devient aussi possible d’en prendre le relais. C’est ainsi que Neuralink compte procéder, par exemple, pour permettre à des personnes paralysées de contrôler un smartphone, ou un ordinateur : en détectant le moment où l’afflux nerveux devrait déclencher un mouvement, et en le relayant après l’avoir décodé.
Des recherches depuis le 18e siècle !
Si Neuralink existe seulement depuis 2016, cela fait bien longtemps que l’être humain est fasciné par les effets de l’électricité sur le corps humain. En fait, il a commencé à s’y intéresser dès son invention, au 18e siècle, en constatant que des faibles courants électriques reliés au nerf sciatique d’une grenouille pouvaient provoquer des réflexes musculaires. Dès les années 1850, un médecin dans l’armée prussienne constate les effets sur les muscles de stimulations électriques sur les cerveaux de soldats ayant été endommagés par des balles. Depuis, les recherches n’ont pas cessé.
Des expériences montrent qu’aujourd’hui, les scientifiques sont déjà capables via des électrodes de capter les signaux électriques du cerveau pour leur permettre de contrôler des machines, des écrans… Les puces internes au cerveau, qui suscitent plus de craintes, sont aussi plus précises.
Que ce soit Neuralink (qui n’est d’ailleurs pas nécessairement le plus avancé sur le sujet) ou d’autres équipes, les recherches sont donc en effet prometteuses. Par exemple, l’entreprise Synchron a récemment reçu l’approbation de la FDA pour tester son implant cérébral sur des personnes paralysées. À terme, ces puces pourraient permettre de rétablir des fonctions motrices, de mieux soigner des maladies neurodégénératives, de contrôler des machines par la pensée, et de restaurer ou d’influer sur les sens humains comme l’ouïe, la vue…