Amazon. Netflix. Facebook. De plus en plus d’entreprises cherchent à réduire à zéro leur empreinte carbone numérique, alors que nos activités sur le web à l’échelle mondiale génèrent autant de pollution que l’aviation commerciale pré-pandémie.
En effet, l’usage d’Internet représenterait 4 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone, selon la firme Website Carbon, un outil qui permet de calculer les émissions de gaz à effet de serre générées par les sites web.
Selon l’entreprise, un site moyen génère 1,76 gramme de dioxyde de carbone pour chaque page téléchargée. Même si ce site ne compte que 100 000 visites mensuelles, il s’agit tout de même de 2110 kg de CO2 relâchés par année, l’équivalent de 87 bonbonnes de barbecue.
Volkswagen Canada a mené la charge cette année en adoptant des pages web moins énergivores pour visionner ses véhicules électriques. Les pages contiennent presque uniquement du texte et même les images en noir et blanc sont construites à partir de centaines de milliers de caractères minuscules.
Consulter ces pages consomme beaucoup moins d’énergie, puisque le téléchargement des données se fait beaucoup plus rapidement.
Si le site moyen génère 1,76 gramme de CO2 par page consultée, les pages carboneutres
du constructeur automobile relâchent une fraction de ce montant, soit 0,022 gramme par page vue, souligne-t-il.
M. Boutin affirme que l’engagement des internautes qui fréquentent ces pages est bien supérieur à celui ailleurs sur le site web de Volkswagen Canada. Les gens passent plus de temps, ils consomment plus de contenu et ils rebondissent beaucoup moins
, affirme le grand patron de la division canadienne.
Pas de la poudre aux yeux
L’an dernier, Volkswagen a été condamnée à payer une amende de 196,5 millions de dollars au Canada dans le cadre du scandale des émissions polluantes.
Entre 2008 et 2015, l’entreprise avait illégalement importé au pays près de 128 000 véhicules non conformes aux normes prescrites sur les émissions de gaz à effet de serre.
À la suite de ces événements, c’est sûr qu’il y a une remise en question totale. On ne peut pas être assis sur la clôture. On doit y aller à fond.
C’est pourquoi le constructeur exige des engagements écologiques de la part de ses fournisseurs et des équipementiers avec qui il signe des contrats. On est un joueur majeur, on a plus de 10 % de parts de marché à travers le monde
, dit-il.
S’attaquer à l’empreinte carbone de son site web s’inscrit dans cette optique, selon lui.
Ce n’est pas une initiative de poudre aux yeux. C’est une initiative pour nous qui est importante pour transformer l’organisation
, affirme M. Boutin.
Le président de Volkswagen Canada affirme que le projet du web carboneutre suscite beaucoup d’intérêt au siège social en Allemagne et dans d’autres entreprises au-delà de l’industrie automobile.
Un mouvement embryonnaire
Le cofondateur de Website Carbon, Tom Greenwood, estime que le mouvement de la carboneutralité numérique est encore embryonnaire
, mais qu’il prend de l’ampleur à l’échelle mondiale.
Le service basé à Londres, en Angleterre, dit travailler notamment des institutions financières, des grands noms de la mode européenne et Network Rail, exploitant du principal réseau ferroviaire du Royaume-Uni. Website Carbon a également conseillé Volkswagen Canada pour la mise sur pied de ses pages carboneutres.
Dans les derniers mois, plusieurs grandes sociétés tous secteurs confondus nous ont contactés pour voir comment elles peuvent réduire leur empreinte numérique.
Il explique que les entreprises peuvent adapter le design de leur site web pour réduire, adapter ou carrément éliminer les couleurs, les photos et les vidéos, qui nécessitent de plus grands transferts de données.
M. Greenwood suggère aussi de chercher un hébergement web vert
, c’est-à-dire que les centres de données et les serveurs qui alimentent le site tournent aux énergies renouvelables. Il faut aussi refroidir ces grandes machines pour éviter des surchauffes et des pannes, ce qui nécessite encore plus d’énergie.
Je pense que la plupart des gens n’ont aucune idée de leur impact parce que la technologie numérique nous semble propre
, affirme le cofondateur de Website Carbon.
Et les géants du web?
Les serveurs qui alimentent les services de diffusion en continu – comme Netflix – et toutes les applications mobiles consomment à l’échelle mondiale presque autant d’énergie que toute l’électricité produite au Canada, selon une étude.
C’est pourquoi l’entreprise californienne s’est donné l’ambitieuse cible de produire aucune émission nette de gaz à effet de serre d’ici la fin de 2022. En comprenant l’empreinte de la diffusion en continu, nos industries peuvent mieux la réduire
, affirme Emma Stewart, cheffe du développement durable chez Netflix.
Pour les émissions qui ne peuvent être évitées, nous investissons dans des projets de restauration et de conservation d’écosystèmes fragilisés
, précise-t-elle.
Grâce à de nouveaux investissements dans des parcs éoliens et solaires, y compris au Canada, Amazon est en voie d’alimenter l’ensemble de ses opérations aux énergies renouvelables d’ici 2025, cinq ans plus tôt que prévu. Le géant du commerce en ligne a souvent fait l’objet de critiques concernant son empreinte environnementale.
Au-delà de se défaire des énergies fossiles, la division des services d’infonuagique Amazon Web Services cherche à éliminer le carbone de l’atmosphère. L’entreprise dit évaluer une technologie de CarbonCure, une compagnie de la Nouvelle-Écosse, qui injecte du dioxyde de carbone liquéfié dans du béton.
Facebook, de son côté, dit déjà tourner aux énergies renouvelables depuis l’an dernier, mais le réseau social cherche maintenant à éliminer complètement les émissions polluantes sur l’ensemble de sa chaîne d’approvisionnement d’ici 2030.
SOURCE: ici.radio-canada.ca